Extrait du journal intime de Yaëlle – 26 mars 2017
Il y a 20 ans…
Le 26 mars 1997, c’était un mercredi. Ma mère et mon oncle m’ont emmené à Vannes, ce matin-là. Je ne me souviens plus des émotions qui me traversaient mais je me souviens de ces trois mots qui tournaient dans ma tête : “Prise de corps”.
Sur la convocation, il était écrit que la “prise de corps” s’effectuerait la veille de l’audience. Je me souviens que je n’aimais pas cette formule.
Après la prise de corps, il y a eu la fouille de corps. Il m’arrive parfois de me demander si c’est le corps ou l’esprit qui souffre le plus dans ce genre d’expériences. Le corps fait physiquement l’expérience alors que l’esprit déguerpit. Il se fait la belle si les émotions sont trop fortes. L’esprit quitte le corps, il s’en va. Quitte à le regretter, plus tard, quand on a besoin de recoller les morceaux de l’histoire. Est ce que le corps pourrait rester ainsi inhabité, un temps donné ? Quand la situation est trop humiliante ? Quand il faut s’accommoder de chiottes derrière un muret de la hauteur d’une table ? Et qu’il faut satisfaire un besoin sous la présence de sa co-détenue ? Le corps oublie t’il le froid de l’acier autour des poignets ?
Moi, étais-je vraiment là ? Mon esprit s’est autorisé à partir, à divaguer, à rêver. J’ai due trier les souvenirs. J’ai sans doute choisi de garder les meilleurs ou alors je suis encore à fantasmer le pire.
Tendresse Infinie