Les lectures

Mariana Enriquez

Alors déjà, il faudrait s’arrêter un instant sur cette couv’ de toute beauté. Elle n’est absolument pas mise en valeur par cette photo qui ne dit rien des lettres argentées, qui ne dit rien de la larme qui scintille, qui ne dit rien de cette chevelure rougeoyante qui s’étend dans le regard…

Quand Nadège me l’a tendu, flambant neuf, jamais ouvert, j’ai été surprise par son épaisseur (près de 800 pages tout de même) et par la densité du texte : des pages pleines, des mots serrés les uns contre les autres me laissant croire que les dialogues étaient inexistants. Une police 10 m’obligeant à tendre les bras pour y voir plus clair… J’ai eu peur de ce monstre de papiers.

Ce livre m’a accompagné dans le train, dans le bateau, en allant en corse, puis en y revenant. Il m’en a fallu du temps pour en venir à bout. Il se mérite ce livre, il est hors des sentiers battus. Les dialogues sont bien présents mais leur typographie est en blocs, ni guillemets, ni tirets, ce qui rajoute de la densité à la densité.

On dit de lui qu’il est un OVNI, qu’il envoûte, terrifie. On le classe dans le genre gothique et horrifique.

On traverse l’Argentine, on effleure la dictature du début des années 80 qui se soldera par des milliers de citoyens persécutés‚ torturés‚ assassinés ou portés disparus mais le politique n’est pas raconté frontalement. Il prend une forme de conte d’épouvante.

C’est la magie noire et les sacrifices qui, ici persécutent, torturent, assassinent et font disparaitre. C’est la secte de l’ordre, l’obscurité qui avale tout, les rituels orchestrés par Juan le medium victime d’un système de domination. C’est Gaspard, le fils de Juan qui hérite du don de médiumnité mais quel héritage maudit. Alors c’est la lutte du père pour protéger son fils. Mais le protéger à grand coup de violence parce que la nature humaine est sordide et qu’une cause louable peut déchainer la cruauté. C’est le mal qui nous habite tous, pavé de bonnes intentions.

Ce livre ne promet rien, il ne se donne pas, il est ardu et pourtant il ne se lâche pas.

J’aime l’ésotérisme et la sorcellerie, j’aime l’invisible, « les morts qui voyagent vite », j’aime les prières, les invocations, les charmes jetés pour tromper ou cacher. Pas certaine que l’on se délecte de l’univers d’Enriquez dans le cas contraire.

Depuis les dernières pages, je me dis qu’il y aura un réalisateur qui en fera un film. Je me dis ça.

J’espère revoir Juan, Gaspard, Rosario, les ados, Tali et la saloperie de Mercedes prendre forme au cinéma…

Je me dis ça ♥

On verra bien…

[Tiens tiens à propos de l’Argentine : « Javier Milei, élu président de l’Argentine, reçoit les félicitations de Donald Trump et Jair Bolsonaro… »
Et l’extrème droite continue de gagner ! Putain de Joie !!!]

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