Expositions, Les jolies choses, Les moments doux

Zloty

Gérard Zlotykamien de son vrai nom est un vieux monsieur aujourd’hui. Il est né en 1940 dans une famille juive. Et alors que toute sa famille fut déportée en 42, il est confié à une famille qui le maltraitera jusqu’au retour de ses parents, les seuls rescapés de sa famille. Il passera sa vie d’artiste à peindre des éphémères « silhouettes évanescentes qui témoignent de la bêtise humaine : tragédies européennes et asiatiques de la seconde guerre mondiale, terrorisme, catastrophes climatiques… » parce qu’il restera hanté par la mémoire des camps, les traumas de son enfance et l’état du monde toujours et encore. [Ne pas s’habituer]

Je connaissais le nom, l’artiste réputé et ses « têtes à toto » et surtout une œuvre nommée « la ronde macabre ». Mais je ne connaissais rien du tout, en fait. Ni de l’homme, ni de son parcours artistique. Alors, je suis allée au musée des beaux arts voir cette rétrospective gratuite.

A l’expo, il y avait un film d’une trentaine de minutes. Des artistes, amis, spécialistes d’art, galeristes, sa femme et Zloty lui-même remontaient le fil de l’existence et exposaient sa vie, ses choix, ses œuvres. Pour les fameuses toiles de la ronde macabre, Zloty n’avait qu’une vingtaine d’années et il fut encensé par la critique. L’état français a même fait l’acquisition des toiles. Mais juste après, il fut censuré pour avoir peint le portrait de 4 dictateurs éviscérés boyaux tout dehors. Il a quitté le monde de l’art mondain et s’est mis à bomber les murs des villes, des lieux voués a être démolis. Il a créé le Street Art. Il a investi des lieux abandonnés : peint dans des décharges, dans des abattoirs. Il a créé l’URBEX. Zloty a investi l’extérieur, le dehors. Là où la censure ne l’arrêterait pas (juste quelques condamnations et amendes somme toute).

Je n’avais pas idée du pionnier qu’il était. Je ne savais pas non plus, que son outil préféré était la poire à lavement (lui et Duchamps font la paire). Il a peint en jet, pressant sur la poire et faisant jaillir ses tripes en des gestes violents, brutaux, précis. Il faut voir l’énergie de l’escrimeur s’attaquant au mur.

Et bien, j’ai été cueillie. Zloty n’a jamais pu parler de son passé, il dit qu’il a dessiné les mots pour ne pas avoir à les nommer. J’ai été cueillie par cet homme simple et c’était si agréable.

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