Les lectures

Un démon

Ok, donc il m’aura fallu ce livre pour sortir de l’envoutement Delaume. Un mec en prison, qui raconte sa vie depuis cette prison et qui remonte le temps.

Un livre écrit dans un souffle, sur un mode qui presse le lecteur parce que le narrateur n’a pas le temps. Il y a l’urgence du récit, de la compréhension, de la réparation, de l’absolution. L’empressement qui se débarrasse des virgules.

On s’attache à ce type, ce paumé, cette victime, cet assassin, ce Tout dont la société enfante trop souvent (bon pas si souvent mais beaucoup trop je te promets) aidée par la monstruosité d’une si mal nommée « famille » qui façonne le pauvre malheureux à coup d’enfermement et de mauvais traitement.

Il s’appelle Duke, mais ça il l’apprend tard, à l’école car jusqu’alors il ignore son prénom puisque ni Duke, ni la fratrie ne seront prénommés près de la colline aux loups.

L’empathie pour Duke fut immédiate, mon attachement croissant parce qu’il veut sortir du cercle du mal, il veut tuer le démon qui jailli de lui sans crier gare et surtout, il veut comprendre. Alors il s’instruit, il lit les confessions de St Augustin. Son « parlement »* est naïf et brut. L’écriture est âpre et rugueuse ce qui rend l’entrée en matière difficile. Les cinquante premières pages m’ont coûtées mais la mélodie des mots, comme le chant des sirènes me séduisait déjà.

*« Maria était habituée à mon parlement décalé et elle disait tu fais des phrases bancales mais plus sensées que les miennes reprends du fromage pour tes os. » (p135 – chap 23)

Ce premier roman est terrifiant, la faute au travail de son auteur qui côtoie les tribunaux depuis plus de dix ans comme journaliste judiciaire, et qui dira dans une interview à Ouest France « quand je suis au tribunal, j’essaie de tout absorber, avec empathie, je ne me protège pas. À force d’absorber, il fallait que je me vide de tout ça, c’était presque vital.« 

Décidément, ces livres sans ponctuation !!! Ils me donnent envie de tant de points d’exclamation !!!

Merci à cette patiente agrégée de lettres modernes (dont l’étendue de la bibliothèque m’a laissée pantoise) qui m’a prêté ce livre, présenté comme un ovni… Elle a su trouver les mots pour me tenter. J’adore mon métier ♥

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